Ah, bien sûr,
si c'était possible,
Honnête et rempli
de pognon.
Mais c'est ça
qui nous rend grognon,
On sait que c'est
inaccessible.
Alors que honnête
et fauché,
C'est ridicule
et ça n'a jamais consolé...
Si pour l'honneur,
tiens tiens l'honneur,
L'honneur, ça
se mange en salade,
Et le bonheur, pauvre
malade,
Le bonheur, il est
pour les chiens.
A quoi ça sert
qu'on s'décarcasse,
Les feignants vivent
mieux que nous.
Les feignants joignent
les deux bouts,
Sans trop se bouger
la surface
On les accueille un
peu partout.
Ils sont si gentils,
voyez-vous.
Ah, bien sûr,
si c'était possible,
Laborieux et considéré.
Essayez, on vous rit
au nez,
On vous trouve vraiment
pénible.
Alors bosseur et
méprisé,
C'est ridicule
et ça n'a jamais consolé...
Si pour l'honneur,
tiens tiens l'honneur,
L'honneur, ça
se mange en salade,
Et le bonheur, pauvre
malade,
Le bonheur, il est
pour les chiens.
A quoi ça sert
d'être pacifique,
Les soudards vivent
mieux que nous.
Les soudards ont un
charme fou,
Et leurs élans
patriotiques
Jettent les foules
à leurs genoux.
On les respecte, voyez-vous.
Ah, bien sûr,
si c'était possible,
Pacifique et bien
protégé.
Mais on est au coeur
du danger,
On fait une trop bonne
cible.
Alors tranquille
et irradié,
C'est ridicule
et ça n'a jamais consolé...
Si pour l'honneur,
tiens tiens l'honneur,
L'honneur, ça
se mange en salade,
Et le bonheur, pauvre
malade,
Le bonheur, il est
pour les chiens.
A quoi ça sert
d'aimer les autres,
Les racistes vivent
mieux que nous.
Les racistes, un peu
partout,
Sous des dehors de
bons apôtres
Cachent les crimes
les plus fous,
Dont ils se vantent
peu ou prou.
Ah, bien sûr,
si c'était possible,
Tolérant et
puis toléré.
Libre d'aimer sans
comparer,
Serait un bonheur
indicible.
Mais tolérant
et tabassé,
C'est ridicule
et ça n'a jamais consolé...
Si pour l'honneur,
tiens tiens l'honneur,
L'honneur, ça
se mange en salade,
Et le bonheur, pauvre
malade,
Le bonheur, il est
pour les chiens.
L'honneur, ça
nous fait bien rire,
Mais qu'est-ce
qu'on va pouvoir leur dire,
A nos enfants...
?
Anne Sylvestre, 1985